Par
Agathe W.
J’ai lu samedi dernier un témoignage intitulé "Je suis enseignante : les élèves sont intenables, leur niveau est accablant. C'est l'enfer"(1). Il s’agissait de celui d’une jeune enseignante, nouvellement nommée en ZEP, qui assure des compléments (c’est-à-dire qu’elle complète les classes d’enseignants à temps partiel), et vit très mal sa situation. Bien entendu, je suis navrée pour cette femme qui doit se sentir malheureuse mais je ne peux que lui conseiller de tenir bon, car je suis passée par là.
J’ai espéré me casser une jambe pour être arrêtée
Comme elle, je suis devenue enseignante car mes plans sur la comète étaient un peu trop vaporeux pour vivre dignement et je ne ferai sûrement pas ce métier toute ma vie.
Lors de ma première année d’enseignement, sans réelle formation, en 2013-2014, j’avais une classe de 34 élèves (dont 21 garçons) de 4 ans. Complètement azimutés. La conseillère pédagogique les avait même qualifiés "d’affreux Gremlins". Cette école n’était pas en ZEP. J’étais la plus jeune de l’équipe, les autres collègues étant des "anciennes".
Cette entrée dans le métier a été une horreur. J’ai beaucoup pleuré, j’ai compté les jours, j’ai espéré me casser une jambe pour être arrêtée pendant plusieurs mois. Pourtant, j’ai tenu bon et mon échec est passé du stade d’angoisse prégnante au stade de bataille au quotidien.
Non, je n’allais pas m’asseoir sur le constat d’élèves trop difficiles, d’une classe surchargée, d’une équipe démotivée, de mon manque cuisant de formation. Il fallait que je me remette en question : qu’est-ce que c’était être "maîtresse" pour moi ?
Un élève heureux = un élève motivé = une maîtresse comblée
Je me suis rendue compte qu’il fallait que je revoie mes objectifs. Les problèmes listés précédemment m’empêcheraient toute l’année de devenir la maîtresse chevronnée que je rêvais être, qui gère sa classe au lever de sourcil (oui, c’est possible) et qui fait des projets sensationnels – celle que je ne pourrais pas être avant des années d’ancienneté, ou celle que je ne serai jamais car en fait, elle n’existe que dans les épisodes du "Bus Magique".
Par contre, rien ne m’empêchait de rendre mes élèves heureux. En interrogeant l’objectif premier de l’école "la réussite de tous les élèves", j’ai réalisé qu’on ne pouvait pas réussir sans être d’abord heureux. Et le bonheur des élèves entraînerait forcément le mien. Pour simplifier mon équation : un élève heureux = un élève motivé = une maîtresse comblée.
Je me suis donc affairée à rendre mes élèves contents de venir le matin. Ces élèves qui venaient de familles au contexte social démuni, ces élèves à qui on diagnostiquait des troubles du comportement ou autres "dys", ces mêmes élèves qui étaient immatures, fatigués, en échec scolaire, arrogants, violents. C’est mon credo depuis trois ans et, aujourd'hui, je peux dire, la tête haute, que je suis maîtresse en ZEP et que c’est chouette ! [...]
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(1) voir l'article ci-dessous
J’ai lu samedi dernier un témoignage intitulé "Je suis enseignante : les élèves sont intenables, leur niveau est accablant. C'est l'enfer"(1). Il s’agissait de celui d’une jeune enseignante, nouvellement nommée en ZEP, qui assure des compléments (c’est-à-dire qu’elle complète les classes d’enseignants à temps partiel), et vit très mal sa situation. Bien entendu, je suis navrée pour cette femme qui doit se sentir malheureuse mais je ne peux que lui conseiller de tenir bon, car je suis passée par là.
J’ai espéré me casser une jambe pour être arrêtée
Comme elle, je suis devenue enseignante car mes plans sur la comète étaient un peu trop vaporeux pour vivre dignement et je ne ferai sûrement pas ce métier toute ma vie.
Lors de ma première année d’enseignement, sans réelle formation, en 2013-2014, j’avais une classe de 34 élèves (dont 21 garçons) de 4 ans. Complètement azimutés. La conseillère pédagogique les avait même qualifiés "d’affreux Gremlins". Cette école n’était pas en ZEP. J’étais la plus jeune de l’équipe, les autres collègues étant des "anciennes".
Cette entrée dans le métier a été une horreur. J’ai beaucoup pleuré, j’ai compté les jours, j’ai espéré me casser une jambe pour être arrêtée pendant plusieurs mois. Pourtant, j’ai tenu bon et mon échec est passé du stade d’angoisse prégnante au stade de bataille au quotidien.
Non, je n’allais pas m’asseoir sur le constat d’élèves trop difficiles, d’une classe surchargée, d’une équipe démotivée, de mon manque cuisant de formation. Il fallait que je me remette en question : qu’est-ce que c’était être "maîtresse" pour moi ?
Un élève heureux = un élève motivé = une maîtresse comblée
Je me suis rendue compte qu’il fallait que je revoie mes objectifs. Les problèmes listés précédemment m’empêcheraient toute l’année de devenir la maîtresse chevronnée que je rêvais être, qui gère sa classe au lever de sourcil (oui, c’est possible) et qui fait des projets sensationnels – celle que je ne pourrais pas être avant des années d’ancienneté, ou celle que je ne serai jamais car en fait, elle n’existe que dans les épisodes du "Bus Magique".
Par contre, rien ne m’empêchait de rendre mes élèves heureux. En interrogeant l’objectif premier de l’école "la réussite de tous les élèves", j’ai réalisé qu’on ne pouvait pas réussir sans être d’abord heureux. Et le bonheur des élèves entraînerait forcément le mien. Pour simplifier mon équation : un élève heureux = un élève motivé = une maîtresse comblée.
Je me suis donc affairée à rendre mes élèves contents de venir le matin. Ces élèves qui venaient de familles au contexte social démuni, ces élèves à qui on diagnostiquait des troubles du comportement ou autres "dys", ces mêmes élèves qui étaient immatures, fatigués, en échec scolaire, arrogants, violents. C’est mon credo depuis trois ans et, aujourd'hui, je peux dire, la tête haute, que je suis maîtresse en ZEP et que c’est chouette ! [...]
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