jeudi 15 avril 2021

Les dérives de l’éducation « positive », signe d’un besoin de changement

Par Diane

Enseignante en maternelle depuis une quinzaine d’années, après avoir exercé en élémentaire, j’ai l’opportunité d’observer au quotidien l’impact sur les parents et les élèves d’un nouveau cadre éducatif issu essentiellement des neurosciences, de la psychologie positive(1) et de la communication non violente(2), appelé « éducation positive ».

Faisant suite à l’autoritarisme mutilant de l’éducation traditionnelle qui imposait sans délicatesse les règles de comportement, et suite au laxisme post 68 qui a fait de l’enfant-roi le tyran de ses parents, on a vu naître les principes de la parentalité positive. L’intention salutaire de ce nouveau courant est de donner la priorité à la qualité des relations instaurées dans la famille, à la prise en compte des désirs et des besoins de l’enfant et au cadre bienveillant.

Sur le terrain, j’ai vu évoluer de façon nettement positive les relations entre les parents et leurs enfants. Cependant, je constate que l’application sans discernement de certains principes nourrit plus l’égocentrisme et la dépendance qu’elle ne fait naître l’autonomie et la responsabilité. La confusion règne entre les besoins de l’être en développement et ses désirs chimériques, entre la dignité du jeune être humain et son illusion de toute- puissance, entre la conscience qui touche à l’Universel et la personnalité qui s’adapte au monde…

L’éducation « positive », tout comme la société dont elle est issue, ignore l’ouverture à la dimension intérieure, spirituelle(3), chez l’enfant, qui est pourtant fondamentale pour que celui-ci grandisse de façon équilibrée, avec toutes les composantes de son être. Mettre les désirs et les volontés de l’enfant au centre de toutes les attentions en négligeant les besoins de son âme conduit à de nouvelles dérives. [...]


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jeudi 1 avril 2021

«  Un état totalitaire vraiment efficient serait celui dans lequel le tout-puissant comité exécutif des chefs politiques et leur armée de directeurs auraient la haute main sur une population d’esclaves qu’il serait inutile de contraindre parce qu’ils auraient l’amour de leur servitude. La leur faire aimer, telle est la tâche assignée dans les états totalitaires d’aujourd’hui aux rédacteurs en chef des journaux, aux maîtres d’école…  »  ( Aldous Huxley, journaliste et romancier, 1894-1963)

La souffrance indolore des adolescents de l’ère Covid

CHRONIQUE. Vivent-ils des heures sombres ? Les ados traversent ces temps-ci quelque chose, mais ne savent pas trop quoi. Et ni les responsables politiques, ni les adultes autour d’eux ne parviennent à leur tenir un discours encourageant et construit.


Par Mara Goyet (Essayiste)

« Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ? » Pourquoi pensé-je à ce vers de Victor Hugo ? C’est précisément le contraire que j’observe depuis les fenêtres de ma salle de classe. À regarder les élèves dans la cour de récréation, on se croirait un jour ordinaire d’une année comme les autres. Mais masquée. C’est une banalité : les enfants sont d’une vitalité sans pareille. Peut-on pour autant parler d’insouciance ?

C’est toujours dans les détails, les remarques incidentes que se révèle le fond de l’affaire. Depuis le début de la pandémie, à chaque événement, allocution ou restriction, une question revient chez les élèves de manière récurrente voire obsessionnelle : ce que nous vivons actuellement sera-t-il un jour étudié à l’école, figurera-t-il dans les manuels scolaires ?

Les jeunes adolescents traversent ces temps-ci quelque chose, mais ne savent pas trop ce qu’ils endurent. Ce n’est ni une guerre ni un séisme ; ils ne voient ni ruines ni cadavres. Cela ne ressemble à rien de ce qu’ils étudient en classe et pourtant cela semble sérieux. Ils éprouvent une souffrance le plus souvent indolore et, entre deux discours institutionnels consacrés à la menace virale ou terroriste, ils reprennent leur vie de collégien. De fait, l’impression de lassitude ou de tristesse qui les saisit est si diffuse et incertaine qu’elle aurait besoin, pour être identifiée, d’une autorité éclairée.

C’est là que le bât blesse. Ni les responsables politiques, la plupart du temps dépassés, pragmatiques ou en pleine contradiction, ni les adultes autour d’eux, qui pataugent dans le même marigot trouble, ne parviennent à tenir un discours cohérent, encourageant et construit à leur endroit. Vivent-ils des heures sombres ? Est-ce grave ou épisodique ? Quelle est leur place dans l’Histoire mondiale ?

Au nom d’une prétendue normalité que tout dément, mais considérée comme salvatrice, on promène ainsi des adolescents sur lesquels on ne veille que d’un œil, notamment parce qu’ils ne sont pas considérés comme vulnérables. Qu’ils aillent en classe, qu’ils fassent leurs devoirs et respectent les gestes barrières tient lieu de programme à leur intention. Ce qu’ils vivent ou en pensent ? Trop peu s’en soucient.

Faute de trouver les éclairages hic et nunc, les collégiens s’en remettent ainsi au jugement de l’Histoire, unique figure d’autorité à leurs yeux, capable de les aider. Elle seule semble à même d’estampiller le quotidien informe et confus qui est le leur, de lui donner un sens rétrospectif. En outre, un label historique serait une juste reconnaissance de ce que cette jeunesse traverse collectivement en solitaire.

Sans pesanteur excessive ni grandiloquence, on repère ainsi, dans cette référence permanente à l’histoire, une imperceptible angoisse eschatologique tapie sous l’effervescence enfantine : à la fin des fins, faute d’avoir pu vivre une vie de collégien normale, moment clé de notre roman d’apprentissage avec son lot traditionnel de jours ingrats et de souvenirs bancals à chérir ou bannir pour toute la vie, restera-t-il au moins quelque chose de cette période ? Il y a là comme un pari pour ses adolescents embarqués si jeunes dans un monde anxiogène : pile, tout sera oublié ; face : il en restera quelque chose. On mesure l’enjeu existentiel et personnel de l’affaire.
Où vont ces enfants qui tous continuent à rire ? Les collégiens attendent visiblement une réponse. Maintenant et de notre part si possible. 

Réf. La chronique de l’Obs du 21.01.21



Préserver l'innocence des enfants



Ariane Bilheran, psychologue clinicienne et docteur en psychopathologie, auteur du livre "L'imposture des droits sexuels", présente le livre "Préserver l'innocence des enfants", paru aux éditions du Bien Commun, ainsi que son auteur le Dr Régis Brunod.

Lettre ouverte au Président

Par Mehdi MARION. Animateur, fonctionnaire et déserteur de l’armée des « enfants soldats ».

"Monsieur le Président,

Je ne suis pas sûr que cette profession de foi vous parvienne mais à l’heure où les ministres tweetent les dernières informations avant de prévenir leurs propres équipes j’ai bon espoir que les réseaux sociaux s’organisent pour rendre cela possible.

Issus de l’éducation populaire je fais partie de la génération des animateurs socio-culturel qui ont construit tous leurs projets éducatifs et pédagogiques autour de la notion du bien être de l’enfant et de son développement. C’est à ce titre que je vous fais parvenir ce que vous êtes libre de considérer comme une simple note de service d’un fonctionnaire.

Le 16 mars 2020 vous avez parlé d’une guerre et de ses héros. Presque un an après en mon âme et conscience, je passe outre le fameux devoir de réserve auquel je suis soumis pour faire valoir mon droit de parent et de citoyen afin de défendre une des valeurs de la république : les enfants de sa patrie.

Monsieur le Président, vous avez parlé de guerre et de héros, je l’ai entendu, nous l’avons entendu. Pour cela mes confrères et consœurs de l’éducation populaire et de l’éducation nationale et moi-même avons appliqué dans nos structures, écoles, MJC, centres sociaux, associations et j’en passe différents protocoles sanitaires émanant de généraux dépassés et désorganisés. C’est souvent le cas dans une guerre en alors braves petits soldats soucieux de sauver la patrie, Nous, les animateurs et équipes municipales ou associatives qui intervenons auprès des enfants sur tous les temps péri et extrascolaires, sur les temps de restauration et sur les services minimum d’accueil quand ils sont nécessaires, nous nous sommes organisés, réorganisés, adaptés, réadaptés afin d’appliquer les ordres sans trop les discuter parce qu’après tout c’est la guerre.

Pour ma part et celle de tous mes collègues de France et de Navarre qui j’espère ne m’en voudront pas de parler en leur nom, l’Enfant, les enfants, nos enfants, mes enfants ont toujours été et seront toujours au cœur de ces aménagements.

Comment appliquer au mieux cette fameuse distanciation sociale, ces gestes barrières tout en préservant leur développement au fil de ces désormais trop nombreuses batailles ? Car voilà, Monsieur le Président, si des batteries de psychiatres alertent dans les médias sur le fait des dangers d’un énième confinement, ils ne sont pas assez nombreux, ou pas assez bruyants à pointer les dangers que représente la collectivité que nous leur obligeons à vivre depuis bientôt une année.

Vous avez parlé de la guerre et de ses héros ô combien nécessaires, mais au-delà des dommages collatéraux que je ne suis pas en mesure légitime de défendre (restauration, culture, hepad…) vous ne nous avez jamais annoncé qu’il faudrait aussi des enfants soldats pour combattre l’ennemi.

Est-ce à cela que vous aviez pensé pour la défense de notre mère patrie ? Car c’est bien cela qu’ils sont devenus aujourd’hui vous pouvez me croire Monsieur le Président : des enfants soldats.

Au front tous les jours. Le prix qu’ils payent se fait désormais sentir, il est visible et s’entend. Le malaise est installé. Des enfants soldats masqués dès leur 6 ans, de 7h30 à 18h30 pour certains et ce cinq jours par semaine et même pendant les vacances. Ils n’ont le droit de dévoiler leur sourire que pour se sustenter le midi ou à l’heure du gouter. Et encore, ils sont organisés en véritables garnisons. En élémentaire, depuis septembre 2020 ils sont parqués, oui parqués car les espaces nécessaires suggérés par les protocoles sont inexistants ou insuffisants et obligent les équipe professionnelles que nous sommes à délimiter des zones. Et je ne parle pas du jeu de la balle au prisonnier Monsieur le Président… Dans cette même zone qui leur est attribuée depuis septembre 2020 ils sont restreints à n’être qu’avec certains de leurs camarades, vous avez dû entendre parler de ce fameux ‘non brassage’ des classes ou des groupes. Leurs jeux sont limités et souvent répétitifs malgré toute la bonne volonté et l’imagination sans bornes des équipes.

Si nous sommes bien en guerre Monsieur le Président, alors j’ai le devoir de vous informer que c’est une guerre sale. Quelle nation sommes-nous pour sacrifier ainsi l’essence même de la vie et de l’innocence par peur de mourir ?

Une de mes filles est en sixième et n’a jamais vu le visage de ses nouveaux camarades venus d’autres écoles. Les élèves de CP n’ont jamais joués avec les plus grands dans la cour. Les petites sections de maternelle n’ont encore rien appris des interactions qu’offrent normalement la collectivité.

Puisque nous en sommes à nous dire les choses Monsieur le Président, les protocoles que je m’efforce d’appliquer en bon fonctionnaire, en plus de miner le moral et la motivation des équipes n’ont aucun sens. Comment pourraient-ils en avoir, rédigés par des technocrates qui n’ont pas vu une cour d’école, une cantine ou un centre de loisir depuis des dizaines d’années.

Des enfants soldats voici les victimes de cette guerre Monsieur le Président. Dociles et résignés comme aucun enfant, nul part dans ce monde ne devrait l’être, et certainement pas en France !

Le confinement alerte sur les violences domestiques que vivent certains enfants, c’est une triste réalité que vous avez le devoir de combattre. Et bien de mon point de vue, votre fonction exige aussi que vous preniez en considération la souffrance devenue quotidienne des enfants scolarisés dans notre pays. Il en est de votre responsabilité Monsieur le Président, la mienne est de vous en faire part.

Les travailleurs sociaux, les animateurs socio-culturels que nous sommes n’arrivons plus à faire rentrer des carrés dans des ronds, nous continuerons de nous y efforcer parce que c’est la guerre, et que la vie continue, mais nous refusons que nos enfants en payent le prix fort.

Les symptômes sont visibles, nos enfants sont malades, pas besoin de leur trifouiller le nez dans leurs établissements scolaires pour les tester. Nous sommes le test est le résultat est on ne peut plus négatif ! Nos enfants jouent moins, sourient moins, rient moins, s’isolent plus ! Ils apprennent moins, sont conscients d’être plus agités, violents et tristes pour certains. Les médias les abreuvent tous les jours de chiffres morbides, car oui voyez-vous, ils entendent tout, voient out, ressentent tout et malheureusement n’arrivent pas toujours à l’exprimer, alors ils souffrent. Ils souffrent à cause de moi, ils souffrent à cause de vous.

Voilà Monsieur le Président, j’ai fini ma bafouille. Puisse-t-elle vous parvenir. Je n’ai pas de conseil à vous donner mais je suis convaincu que museler et restreindre nos enfants n’est pas la bonne façon de faire. Les effets de ces choix ne participent en rien à l’effort de guerre et au contraire ne font qu’augmenter le nombre des victimes en diminuant nos forces armées de demain."


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