mercredi 27 novembre 2013

En Suède, le règne contesté de l’enfant-roi

Le pays de l’enfant roi deviendrait-il celui de l’enfant tyran ? Souvent cités en exemple pour les bienfaits de leurs méthodes d’éducation, les parents suédois rencontrent un nombre croissant de problèmes d’autorité avec leurs chérubins. Père de six enfants et psychiatre, David Eberhard développe cette thèse controversée au royaume scandinave dans son essai publié à Stockholm en 2012, « Comment les enfants ont pris le pouvoir ».


Par Marianne Meunier

Dérives : L’interdiction des châtiments corporels, pour laquelle le pays a été pionnier – il l’a inscrite dans son code pénal en 1979 –, a peu à peu dérivé en interdiction de toute forme de correction, souligne-t-il. Heure du coucher, menu des repas, lieu des vacances… La culture du dialogue, poussée à son extrémité, fait quant à elle de la vie quotidienne de certains parents une bataille sans fin ou tout doit être justifié, argumenté, défendu. Et c’est encore le meilleur des cas, les décisions pouvant être tout simplement prises par l’enfant. 
Des dérives également exposées dans un documentaire diffusé en décembre 2011 sur Arte, "Au pays de la fessée interdite", où deux psychologues de la famille soulignent combien certains parents ont du mal à poser des limites à leurs enfants, notamment à l’adolescence. 
Dans un pays où l’enfant est sacralisé et son éducation dramatisée, le psychiatre David Eberhard déplore aussi les excès de ces nombreux pères et mères qui consultent des experts en tout genre pour obtenir des conseils, plutôt que de penser par eux-mêmes. D’après lui, cette attention de tous les instants prêtée aux souhaits des petits fait de ces derniers des déçus de la vie, une fois qu’ils ont quitté le cocon familial. « Leurs attentes sont trop élevées et la vie trop dure pour eux », explique-t-il, cité par l’AFP. 

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La formation de citoyens conscients de leurs responsabilités

L’éducation est un droit civique – la formation de citoyens conscients de leurs responsabilités


Par Erika Vögeli

L’école obligatoire suisse, mais aussi les institutions d’éducation supérieure du niveau tertiaire, surtout les universités, ont totalement été retournés par d’innombrables réformes ces dernières années. Et d’autres doivent encore suivre. Entretemps, beaucoup de PME n’embauchent plus d’apprentis, parce que les jeunes gens ne satisfont plus aux conditions personnelles et scolaires exigées pour le travail dans une entreprise.
D’autres ont commencé à effectuer des examens d’entrée ou des tests, car pour eux les notes scolaires n’ont plus de force d’expression. L’introduction permanente de nouvelles méthodes et de manuels scolaires et l’effort administratif croissant, qui évince en beaucoup de lieux une véritable réflexion pédagogique, ont fait de l’école une formation comparable à juste titre aux papiers de camelote de la bulle financière. Les promoteurs – les USA, l’UE et l’OCDE avec la «charrue Bertelsmann» à l’avant – se réjouissent apparemment du succès.
En outre, il y a un gonflement immense de mesures «thérapeutiques» – dans beaucoup de classes; il y a, à côté du professeur principal, toute une série de professeurs spéciaux et de thérapeutes. Si les enfants se développent dans un domaine ou l’autre un peu plus lentement ou un peu trop vite, les parents se voient vite confrontés à la question d’un quelconque dépistage de leur enfant, avec des diagnostics et des mesures corrélatives spéciales. S’ils ont de la chance, ils peuvent juste éviter une prescription de Ritaline. 
Beaucoup d’enseignants, et surtout ceux qui sont très expérimentés, sont de l’avis que toutes ces réformes ont mené à la situation suivante: un apprentissage tranquille dans le cadre d’une classe et la constitution d’une véritable communauté de classe ne sont apparemment plus voulus d’en haut – jusqu’à présent, personne n’a osé se montrer avec une justification sincère dans les salles des professeurs –, avec toutes les conséquences que cela implique pour le côté émotionnel de l’école et de l’apprentissage et pour la démocratie. Les enseignants expérimentés déplorent que les enfants ne reçoivent plus de connaissances fondamentales solides et qu’ils ne soient pas assez préparés à la vie professionnelle, sans parler des devoirs du citoyen dans la démocratie. 
Les «réformes» soi-disant nécessaires pour l’économie en raison de la mondialisation ne servent ainsi pas du tout à l’économie réelle, et elles négligent un des plus importants devoirs de l’école obligatoire dans un Etat démocratique: la transmission du savoir comme droit civique et la formation de citoyens conscients de leurs responsabilités. 

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