mercredi 22 juin 2016

Personne ne peut y échapper, c’est l’eurofoot...

Personne ne peut y échapper, c’est l’eurofoot ! Bon, on peut faire autre chose que de regarder les écrans, fermer les radios, se dire qu’on est au-dessus de ça, mais on peut aussi en penser quelque chose !


Par Bernard Collot

Je me suis souvent demandé pourquoi l’espèce humaine avait une telle propension à jouer sans fin avec des objets ronds. Peut-être est-ce parce que c’est la seule à avoir prolongé sa puissance au-delà de l’enveloppe de chacun de ses êtres en projetant des objets pour se défendre, pour atteindre une proie, un ennemi… En somme nous avons la capacité unique d’étendre notre espace de pouvoirs au-delà de notre corps. Nous n’arrêtons pas de lancer, des fusées, des idées, des invectives… et d’attraper, des coups de soleil, des maladies, des poux…

Si le chaton est naturellement mobilisé par ce qui bouge, le petit enfant joue naturellement à faire bouger, faire tomber. Quelle jouissance quand il lance pour la première fois un caillou dans l’eau ou une poignée de sable dans les yeux de la petite sœur ou du petit frère. Même avec les pieds qui pourtant ne sont pas faits pour ça il est si drôle de projeter la boite de conserve qui traîne par terre sans même avoir besoin de se baisser. Mettez une balle, un ballon quelque part, il y aura toujours quelqu’un qui fera quelque chose avec parce qu’en plus cet objet roule, rebondit, on peut lui donner vie ce qu’on ne peut faire avec une pierre.

Bon, nous sommes donc une espèce animale de lanceurs et d’attrapeurs. Mais alors pourquoi une grande partie de nos activités ludiques collectives se fait à partir d’un unique objet sphérique ? Le lien ! C’est le ballon qui crée le lien entre plusieurs personnes, qui leur fait faire quelque chose ensemble, qui les incite à être ensemble.

Peut-être est-ce parce que nos sociétés ont de plus en plus de mal à faire ensemble (donc à être une espèce sociale) qu’il y a un tel engouement pour le foot. Vous avez deux équipes sur un terrain, enlevez le ballon, les joueurs ne savent plus que faire, qu’inventer ensemble et chacun rentre chez soi. Il n’y a pas de sport collectif sans un objet commun sans passes, cela arrive à être le seul endroit où l’on est dans l’obligation de se passer quelque chose les uns aux autres. On peut imaginer un super joueur tellement habile qu’il puisse traverser le terrain seul et allant marquer chaque fois un but ; il n’y aurait plus personne pour jouer avec lui et plus personne pour regarder, il n’y aurait plus de jeu possible. Avoir un objet commun sur lequel agir et qui puisse être le prétexte à être ensemble, jouir enfin du ensemble. L’espèce de folie qui touche surtout le foot quand un but est marqué dans la manifestation hystérique des joueurs et des supporters est peut-être le reflet terrible du manque total par ailleurs de jouissance collective de réussite [...]


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