lundi 1 janvier 2018

L'aspiration au sublime

Par Maria Montessori

Quand nous considérons l’humanité dans sa grandeur, à travers l’histoire et l’évolution, nous voyons que cette aspiration au sublime est un instinct de l’homme : il essaie de pénétrer sur tous les plans, pour protéger et améliorer la vie, et il aide la vie grâce à sa pénétration intellectuelle. L’agriculteur ne passe-t-il pas sa vie à soigner les plantes et les animaux ? Et le savant à manier amoureusement microscopes et lentilles ? L’humanité commence par saisir et détruire, et finit par aimer et servir chaque chose avec intelligence. Les enfants qui déracinaient les plantes du jardin en surveillèrent par la suite la croissance, comptant les feuilles, les mesurant : ils ne parlaient plus des plantes, mais de « la plante ». Cette sublimation et cet amour sont dus à la conscience acquise par l’esprit. On ne pourra jamais éviter la destruction par les sermons. Si l’enfant veut les choses pour lui et pour que les autres ne les aient pas, et que nous cherchions à le corriger en le sermonnant ou en faisant appel à son sentiment, il pourra bien résister cinq minutes à sa tentation, mais il retournera vite à ce qu’il était. Seuls, le travail et la concentration qui apportent d’abord la connaissance et puis l’amour, pourront l’amener à une transformation qui révèle l’homme spirituel.

Connaître, aimer et servir, voilà le triptyque de toutes les religions ; mais le constructeur de notre spiritualité, c’est l’enfant ; il a révélé que la nature a un plan pour notre comportement et pour notre caractère. Un plan bien délimité et détaillé pour tous les âges : travail, besoin de liberté, activité intense, selon les lois de la vie. Ce qui compte, ce n’est pas la physique, la botanique, ni le travail matériel : c’est la volonté et les éléments de l’esprit qui sont en train de se construire grâce à l’exercice. L’enfant est le constructeur spirituel de nous-mêmes, adultes, et chaque obstacle que nos mettrions à son libre développement deviendrait une pierre des murs de la prison de l’âme humaine.

Extrait de « L’esprit absorbant de l’enfant » de Maria Montessori – Ed. Desclée de Brouwer