mercredi 1 février 2017

L’imagination enfantine révélatrice de la vie psychique



Les enfants ont de l’imagination, c’est un fait bien connu. Cependant, débridée, sans ancrage intérieur, elle n’est qu’égarement de l’esprit et il est vite nécessaire d’en stopper le flot errant et fatiguant. Les fruits de l’imagination ne sont vraiment porteurs de sens que s’ils naissent du silence. Quand le silence est appréhendé comme une présence merveilleuse qui contient tout, à travers des exercices tels que la leçon de silence (1) de Maria Montessori, la créativité trouve un axe à partir duquel se développer.
Certaines images ou petites histoires inspirées jouent le rôle de révélateur de la vie psychique de l’enfant et peuvent l’aider à ramener à la surface les problèmes psychologiques qui le travaillent inconsciemment. Les images-symboles, qui émergent et évoluent avec le temps, peuvent renseigner les adultes accompagnateurs sur les difficultés vécues et apporter des éléments de compréhension pour régler des situations de déséquilibre, devenues intelligibles.
Je prendrai, en illustration, le parcours « intérieur » de Victor, élève de 4 ans que j’ai eu dans ma classe. Les progrès de son comportement ont suivi en parallèle l’évolution de son imagination créatrice.

Voici, sur une période de six mois, ce qu’il a exprimé après des pauses de silence partagé dans la classe :

Octobre :
-        J’ai senti un dinosaure et un tigre qui se battaient. J’avais un arc et des flèches.

Novembre :
-        J’ai vu un tyrannosaure qui se battait. Il y avait une tête de mort qui est arrivée. Les dinosaures sont partis. Je voulais les suivre et mon soleil, il a dit non.
-        Dans mon cœur, on dirait qu’il y a des bêtes féroces qui se battent.
-        J’ai senti un indien et un cowboy, ils se battaient. Mon soleil et mon éclair ont dit non.

Décembre :
-        Il y avait encore des petits monstres, mais ils ont décidé de ne pas se battre.
-        Maintenant, j’obéis à mon cœur et à mon soleil.
-        Quand j’étais en vacances, je dormais dans la voiture, j’ai rêvé de Professeur Hibou (2).
-        Dans le chemin, j’étais avec une voiture de course. Un léopard est passé, je l’ai suivi. Après il y avait un lion. Je suis allé dans la voiture de course et j’ai roulé sur le chemin. Après, les petits monstres suivaient les traces de la voiture.
-        J’ai senti que, dans ma lumière, il y avait des pièces d’or et aussi un trésor. Je voulais pas ma lumière. Le cœur, il m’a dit oui ; mon éclair y est allé et des gens m’ont empêché d’y aller. Quand les gens n’étaient plus là, j’ai pris toutes les lumières, je les ai mises dans ma voiture de course et j’ai retrouvé mes amis.
-        J’étais dans une forêt, il y avait des milliers d’arbres. Il y avait une toute petite fleur. Un homme est venu et a écrasé la fleur. C’était la fleur de mon cœur. Après, elle a repoussé.



(1) La leçon de silence inspirée de Maria Montessori :
Je m’assois sur le bord d’une chaise, le dos droit, les pieds posés sur le sol légèrement écartés, les mains posées sur les genoux, je ferme les yeux. Je dis à mes pieds de ne pas bouger, je dis à mes mains de ne pas bouger, je dis à mon ventre de se gonfler doucement, je dis à ma bouche de rester fermée, je dis à mon nez de ne pas souffler fort. Je respire doucement. Je descends dans mon cœur et j’écoute le silence.
(2) La leçon de Professeur Hibou :
Une histoire pour apprendre à écouter son cœur et être sage. Les ateliers de la plume-Editions.